LA PEÛTE BÊTE


Elle se rattache à une légende de Jean Robinet. Il y a de nombreuses années, les loups et autres fauves s’attaquaient aux habitants, ils venaient les nuits d’hiver hurler jusqu’aux abords du village. Mais des battues étaient organisées et de temps en temps un vieux mâle était abattu. On évitait de sortir après le crépuscule, seul et sans arme.
Un animal plus féroce que ceux connus jusque là venait d’arriver dans la région. Sa voix était une voix inconnue et à l’entendre toute la contrée frissonnait. Le monstre s’attaquait aux animaux, mais surtout aux jeunes femmes et les dévorait après leur avoir fait subir les derniers outrages. On avait peur, on priait St-Didier le patron de la paroisse et St-Georges, qui avait terrassé le dragon, et dont la chapelle au milieu du cimetière domine le village. Mais il fallait vivre quand même et pourvoir aux besoins de la population.
Pour éviter que les femmes ne continuent à se faire attaquer lorsqu’elles se rendaient à la rivière, les habitants décidèrent de construire une fontaine au milieu du village. La veille de l’inauguration, les filles du lieu se rassemblèrent au lavoir pour rincer gaiement leur dentelles, en vue du bal qui clôturerait la fête.
Soudain le monstre sortit des fourrés en rugissant. La bête était horrible, on s’enferma dans les maisons voisines de la place. Mais les lavandières continuaient leur lavage. Pour elles aucune possibilité de retraite. Une seule la plus jeune, mais aussi la plus belle pensa à prier Dieu, Vierge Sainte, Saint-Didier, Saint Georges. La bête bondit dans la fontaine neuve pour s’y baigner avant d’aborder sa proie. Elle s’apprêtait à sauter sur la jouvencelle lorsqu’un chevalier à l’armure étincelante surgit du ciel.
Il s’interposa la lance au poing et le monstre posté au milieu du bac de la fontaine ouvrit grand la gueule pour cracher des flammes sur l’intrus. Le cavalier prompt comme l’éclair, planta sa lance dans la gueule du monstre. La bête qui avait reconnu Saint-Georges se figea, son corps se changea en pierre et l’eau se mit à couler du morceau de lance qui lui sortait de la gueule. Cette hampe bientôt se transforma en tuyau de plomb et c’est ce tuyau que l’on voit encore aujourd’hui. Saint-Georges était passé comme la foudre avant de retourner vers le ciel.