La Fontaine Saint-Laurent du Pouldour de Plouégat-Moysan
Plouégat-Moysan est une ancienne paroisse primitive. Les luttes religieuses n’affectèrent pas la commune, le protestantisme n’y étant apparu qu’au XIXème siècle. Outre l’église Saint-Pierre reconstruite en 1874, il existait plusieurs chapelles dont la majorité sont disparues ou à l’état de vestiges. La chapelle ruinée de Saint-Laurent du Pouldour datait du XVIème siècle et dépendait du manoir de Kerbabu. A la Révolution elle fut vendue aux enchères comme bien national. François-Marie Le Magne curé assermenté en fut l’acquéreur. En 1855 la fabrique en devint propriétaire grâce à la souscription des paroissiens. Entre 1874 et 1879, la chapelle Saint-Laurent servit de lieu de culte pendant la construction de l’église paroissiale actuelle. Cette chapelle était très importante, et son pardon se déroulait le 10 Août.
A cette chapelle était associée une fontaine sous le vocable Saint-Laurent du Pouldour (signifiant trou d’eau), elle date du XVème-XVIème siècle et coule au hameau de Stivel. Elle présente une structure particulière, sa source ne coule pas depuis un bassin mais sourd dans un édifice rond en forme de puits qui laisse s’écouler l’eau dans une rigole longue d’environ six mètres jusqu’à un mur de granit d’où elle tombe sous forme de cascade, dans un bassin situé deux mètres en contrebas. Il n’y a pas de niche pour la statue du Saint. Le rite qui accompagne cette fontaine a pour partie son origine dans un lointain passé. Dans la nuit qui précédait le Pardon de Saint-Laurent, le dimanche suivant le 10 Août, les pèlerins accomplissaient à genoux le tour de la chapelle, puis passaient sous une pierre creusée en forme de four, rappelant le supplice infligé à Saint-Laurent. Ensuite les hommes se baignaient, nus, dans la source. Une fois rendus forts par l’eau froide, ils participaient à des jeux de combats pour se réchauffer.
Après minuit, c’était au tour des femmes de pratiquer leurs ablutions dans une tenue tout aussi légère. Toute la nuit ce n’était que danse, libations, tournois de lutte etc. Un autre rituel consistait à couper la chute d’eau à l’aide de couteaux afin d’anéantir symboliquement le mal. Ceux qui ne voulaient pas paraître nus en public envoyaient une mendiante accomplir en leur nom ce rituel. Ces rites étaient vraisemblablement issus d’un ancien culte des eaux, antérieur à la christianisation.En 1855 le Maire de Plouégat-Moysan, alors que les autorités religieuses n’avaient pas réagi contre ces agissements indécents et ces coutumes prit un arrêté officiel :
« Article 1 : les combats nocturnes aux alentours de Saint-Laurent lors de la célébration du Pardon sont désormais interdits pour toujours.
Article 2 : Quiconque aurait à l’avenir l’idée d’offenser la décence publique en dévoilant sa nudité sous la fontaine de Saint-Laurent sera poursuivi conformément à la loi.
Article 3 : Toutes les buvettes installées sous des tentes aux alentours à l’occasion du Pardon doivent fermer aux mêmes heures que les autres débits de boisson.
Arrêté et exécuté ;
Le 10 Août 1855
Signature : Y. Le Bougeaut »
Les eaux de cette fontaine auraient des propriétés guérisseuses pour les rhumatismes, les brûlures, mais aussi le don de redonner la virilité.