LE DERNIER VOYAGE DE L’ANGE


La petite statue de l’Ange posée sur la pierre au sommet de la fontaine partait souvent en voyage.
En automne, lorsque les quetsches étaient mûres, elles étaient transformées en confiture dans de grandes bassines de cuivre. Le soir de la cuisson, les garçons et les filles assis en rond chantaient, les anciens jouaient aux jeux “Bonhomme en bois”, “rapp prend la casquette”, ensuite, il y avait les gages. On devait trouver du raisin, ou du vin, ou encore chercher l’Ange qui souvent était absent, laissant libre sa place à la fontaine. On le retrouvait dans une cuisine, ou n’importe qu’elle pièce, ou dans le lit d’une maison. Le perdant du jeu devait récupérer l’Ange et le remettre à sa place (avec discrétion).
Peu de temps avant la seconde guerre mondiale, la St-Jean tombant un dimanche, ce jour là de bonne heure tout le monde s’est rendu à la fontaine. Les villageois découvrirent l’Ange couché dans un lit bien bordé, lequel lit posé sur une charrette autour de laquelle étaient disposés tous les pots de fleurs du village, que durant la nuit, les garçons avaient subtilisés aux fenêtres et dans les jardins. L’Ange était à l’honneur au milieu des fleurs, chacun devait récupérer son bien. Le lit appartenait à Achner Käth, qui de bon matin, l’avait mis à s’aérer à la fenêtre, grande ouverte, et oublié par la suite de faire son lit.
Aujourd’hui, l’effigie de l’Ange est scellée sur le sommet de la fontaine.