SAINTE-RICHARDE sa Légende


Charles le Gros fit murer son épouse à cause des méchants bruits que faisaient courir sur elle certains écuyers, blessés par son dédain. Un homme se fit connaître de l’empereur et dit : Je suis le sire d’Andlau, j’habite la vallée où il y a plus d’ours que d’hommes, on a tenu des propos malveillants sur ta femme, qu’on vienne m’en rendre compte car elle est de ma famille. L’homme défendit l’honneur de la Dame devant les écuyers félons, qui furent défaits. Richarde fut délivrée et laissée libre par son époux de partir accompagnée du sire d’Andlau et des gens d’Alsace. Ils galopèrent des jours et des jours. Un soir un ermite lui cria : Va vers les bêtes sauvages, va leur prêcher la bonne parole. Dans la vallée là-bas, quand tu verras une ourse noire gratter la terre, arrête-toi, et bâtis une maison pour Dieu. Richarde continua sa route, et comme elle s’enfonçait dans une sombre vallée, le sire d’Andlau lui cria : “Madame Richarde c’est ici que commence mon pays! ” La vallée semblait se rétrécir de plus en plus. Soudain, là ou l’on aperçoit la plaine, l’impératrice s’arrêta. Une ourse noire grattait la terre. “Que fais-tu pauvre bête ? Tu m’indiques le terme de ma route? L’impératrice caressa la tête de l’ourse qui lui montra le corps raidi de son ourson. Des larmes coulaient des yeux de la bête. Mme Richarde prit l’ourson dans ses bras et le réchauffa contre son sein. “Pourquoi voulais-tu l’enterrer, ton petit? dit-elle, il n’était qu’engourdi”. Les chevaliers avaient mis pied à terre et regardaient le prodige du colloque entre une impératrice et un animal sauvage. Richarde commanda que des maçons de Barr vinssent bâtir un grand couvent pour les pauvres et les déshérités. Le sire d’Andlau fit élever une forteresse à deux tours, qui regarda la plaine. On dit que le jour de la consécration du couvent les ours de la vallée d’Andlau vinrent respectueusement adorer le Créateur. On dit aussi que l’impératrice une fois morte, l’ourse gratta la terre, comme sur la route, mis à jour le corps de sa bienfaitrice, tenta de la réchauffer, gémit toute une nuit, et mourut à son tour.
(extrait de ” Histoires et Légendes d’Alsace mystérieuse” de Pierre Schmitt (Tchou éditeur))